Migraine chronique : L’espoir d’un futur traitement ?

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Rédigé par Deborah L. et publié le 10 juin 2021

Maladie fréquente et sans caractère de gravité, la migraine peut néanmoins se révéler handicapante lorsqu’elle devient chronique. L’impact sur la qualité de vie du patient est alors non négligeable. En découvrant un nouveau mécanisme cellulaire potentiel impliqué dans la migraine chronique, des chercheurs américains suggèrent une nouvelle façon de traiter cette maladie.

Migraine chronique chez une femme

Migraine chronique et impact sur la qualité de vie

Touchant plusieurs millions de personnes en France, la migraine désigne une maladie sans gravité dont l’un des symptômes est le mal de tête. Elle peut néanmoins se révéler handicapante lorsqu’elle devient chronique avec un impact non négligeable sur la qualité de vie et l’activité professionnelle.

À savoir ! On parle de migraine chronique lorsque le patient souffre de maux de tête pendant au moins 15 jours par mois pendant plus de 3 mois.

Certaines personnes sujettes aux migraines chroniques peuvent en effet voir leur quotidien grandement affecté par un nombre élevé de jours de migraine et l’échec de différentes solutions thérapeutiques. Car les thérapies disponibles contre la migraine ne sont souvent que partiellement efficaces ou mal tolérées par les patients, d’où le besoin croissant en thérapies médicamenteuses plus diversifiées.

Dans ce contexte, une équipe de scientifiques américains s’est intéressée à la neurobiologie de la douleur et des maux de tête pour en comprendre davantage les mécanismes. 

Plasticité neuronale et migraine

A la tête de ces travaux publiés dans la revue eLife, le professeur Amynah Pradhan qui est agrégée de psychiatrie à l’Université de l’Illinois à Chicago. L’objectif de l’étude ? Identifier les mécanismes impliqués dans la migraine chronique pour pouvoir à terme proposer de nouvelles solutions thérapeutiques.

Pour mener à bien leurs recherches, le professeur et son équipe se sont intéressés aux neurones qui ont une capacité singulière : celle de se modifier et se remodeler tout au long de la vie. Cette « plasticité neuronale » fait appel à des mécanismes  permettant aux neurones de s’adapter à un environnement extrêmement changeant et à des modifications fonctionnelles. Egalement mise en œuvre lors de processus pathologiques, la plasticité neuronale peut donc jouer donc un rôle essentiel dans la genèse et le traitement des troubles du système nerveux central comme la douleur chronique, la dépression ou encore la toxicomanie. Mais cette plasticité neuronale s’appuie avant tout sur une protéine particulière appelée tubuline.

À savoir ! La tubuline constitue le cytosquelette (ou squelette de la cellule) qui maintient la structure cellulaire et sa rigidité.

Cette protéine est dans un état permanent de flux, croissant et décroissant, pour modifier la taille et la forme de la cellule. Car dans l’organisme, la tubuline est soumise à un processus chimique appelé « acétylation » :

  • Lorsque la tubuline est acétylée, elle favorise un cytosquelette flexible et stable
  • En revanche, la désacétylation de la tubuline, sous l’effet d’une enzyme, l’histone désacétylase 6 (HDAC6), favorise l’instabilité du cytosquelette.

Cette propriété dynamique de la cellule permet ainsi au système nerveux de s’adapter en fonction de l’environnement.

Vers une nouvelle stratégie thérapeutique contre la migraine chronique

Sur la base de ces données neurobiologiques, les scientifiques américains ont étudié la complexité neuronale sur des modèles de souris. Ils ont alors observé qu’en inhibant la molécule HDAC6, l’acétylation de la tubuline et la flexibilité du cytosquelette étaient restaurées. Pour les chercheurs, ces résultats laissent penser que les patients souffrant de migraine chronique ont peut-être une flexibilité neuronale réduite. La diminution de la complexité neuronale pourrait donc être une caractéristique ou un mécanisme de la migraine chronique.

D’où l’intérêt de restaurer cette complexité neuronale en bloquant l’enzyme HDAC6 afin que le cerveau soit plus réceptif aux traitements antimigraineux. Pour l’auteur principal de cette étude, ces résultats plantent les jalons du développement d’inhibiteurs de HDAC6 en tant que nouvelle stratégie thérapeutique contre la migraine. Un possible futur traitement pourrait donc voir le jour.

Mais les scientifiques ne comptent pas s’arrêter en si bon chemin car la molécule HDCA6 a également été identifiée comme cible dans d’autres types de douleur. Des inhibiteurs de HDAC6 sont d’ailleurs en cours de développement dans le cadre de la recherche contre le cancer. Reste à savoir si ces changements liés à HDAC6  constituent ou non la signature de toutes sortes d’états de douleur chronique !

Déborah L., Docteur en Pharmacie

Sources
– Possible novel migraine therapy. sciencedaily.com. Consulté le 7 juin 2021.
– Plasticité cérébrale : le cerveau, c’est fantastique. franceculture.fr. Consulté le 7 juin 2021.